Un jour, je me suis mise à divaguer. Je n'ai pas remarqué tout de suite que j'étais en train de me perdre, et j'avançais à l'aveuglette. J'ai d'abord perdu toute confiance en moi, toute estime pour moi-même. Je n'étais ni digne, ni unique. J'étais différente, anormale. J'ai vu les autres s'aimer. Je les ai vu se prélasser ensemble dans l'herbe. J'ai vu les autres rire. Je les ai vu être des amis, de vrais. Mais je ne me sentais pas comme faisant partie de tout ça. J'étais ailleurs. Je vivais dans un corps, je pensais, mon coeur battait... Mais c'est comme si tout était déconnecté. Je n'étais pas responsable de mes propres actes, ou, je n'en avais pas l'impression. Un trou béant se creusait dans ma poitrine, et lorsque le vent agitait mes cheveux, je ne ressentais rien. J'étais vidée de tout sentiment. Lorsque quelqu'un venait me parler, il m'irritait. J'étais impuissante face à cela. Je voulais juste être seule, qu'on me laisse en paix, car malgré tout ce qu'ils pouvaient faire pour moi, j'étais toujours aussi seule, aussi pauvre, aussi perdue. Il manquait quelque chose à ma vie. Rien n'avait de sens, la vie, la mort, l'amour, la guerre... Tout ça ne voulait plus rien dire pour moi.
Un jour, je me suis mise à divaguer. Et rien n'a jamais été pareil depuis. Je ne suis pas la même, mais je ne suis pourtant pas différente. Le jour où j'ai cessé de m'aimer, ce jour où je me suis trouvée anormale, quelque chose m'a été prit. Et ce sentiment de n'être rien restera à jamais en moi, ce souvenir de ces jours où je me suis sentie si seule restera. J'ai vu les autres rompre. Je les ai vu se prélasser dans l'herbe en fumant et en buvant. J'ai vu les autres rire bêtement. Je les ai vu oublier leurs amis, les vrais. Le problème, c'est que je ne suis pas la seule à avoir divaguer, voyez-vous. Les gens changent. Les gens meurent de l'intérieur. Les gens et leurs âmes brûlent ensembles. C'est ainsi. Le tout, c'est de savoir comment renaître de ses cendres. Soyez des phœnix.