2. Accorder ses violons.
A un moment, il se tient près de moi, et c'est comme si tout semblait figé dans le bonheur et la paix durant ces quelques minutes. Il passe devant moi à cinq reprises, et j'en viens à me demander s'il n'a donc pas compris combien sa présence m'est difficile à supporter. La raison m'arrête : savoir ce genre de genre est dur. Nous pouvons supposer, imaginer... Mais savoir, non, savoir reste improbable. Je sens son regard qui me fixe, son attention dirigée vers moi, et pourtant, il est loin derrière moi, avec d'autres. Je me sens étrangement petite lorsqu'il passe près de moi, minusculement ridicule, mais je tente de faire semblant de ne l'avoir pas remarqué. Il est difficile de comprendre comment marche tout ça, ce genre de choses, l'attirance, les regards, l'amour en général. J'ai du mal, encore, à saisir les règles de ce jeu. Je vois bien tous ceux qui ont gagné la partie, ainsi que ceux qui perdent, mais il semble y avoir très peu de gens comme moi, qui ne savent pas jouer. Personne ne m'a jamais appris. Soudain, je me lève et je me retourne vers lui. Nos yeux tristes et lointains se croisent. Il ne détourne pas les yeux, mais je dois continuer mon geste, et lui tourne finalement le dos pour partir. Qu'aurai-je fait pour que ce moment soit une éternité ? Jusqu'où serai-je allée pour le regarder dans les yeux jusqu'à la fin de ma vie ? Abandonnée dans cet océan de désirs, j'erre, et me perds dans les méandres de mes sentiments. Comment fera t-on, lorsqu'il faudra me retrouver ? Car je compte bien un jour mettre un pied sur terre, et jouer.