Vous, vous, mes amis, vous qui comprenez, vous qui savez... Comment pouvez-vous encore me mettre dans ce coeur déjà blessé, cette épée si lourde qui achèvera de me tuer ? La nuit n'est-elle déjà pas assez noir ? Faut-il encore que vous vous joignez à cette déesse, à cette enchanteresse qui charme tous les esprits ? Ainsi, vous aussi, elle vous a pris. Elle vous a arraché de moi, comme on s'arrache à la vie, lorsque, de loin, nous ne voyons plus aucune issue... Elle éloigne de moi tout ce que j'aurais voulu. Et Dieu seul sait combien j'aurai voulu qu'elle ne soit pas cette affabulatrice, ou combien j'aurais aimé qu'elle n'existe pas.
Il fait froid ce soir, et c'est ainsi que commence la nuit des traîtres. Non, je ne vous en veux pas, mes très chers, tout le monde a le droit à l'erreur. Elle vous a eu, je ne vous ai pas assez mis en garde. Et à présent, il fait froid. Dans mon coeur. Dans mon corps. Dans ma vie. Le sol est gelé, les feuilles des arbres sont tombées, laissant leurs propriétaires dénudés, la raison s'est figée. Ne voyez-vous pas que tout n'est que mensonges ? Son image n'est qu'un reflet de ce que vous voudriez voir, elle a trouvé la formule pour être aimée. Elle intrigue, et elle fait ainsi chavirer toute pensée de son côté. Trahison, trahison ! Vous pourrez tous la rejoindre, vous l'aimerez, vous serez des idoles. Elle n'aura rien fait, car c'est un mythe qui la construit, et elle ne fait rien d'autre que de vivre pendue à des filets que quelqu'un s'amuse à maîtriser. C'est ainsi donc elle, la traitresse. Dépendante de son propre maître, elle ne fait que retourner une situation. Voyez qui elle, voyez donc.
La nuit est déjà bien entamée, la nuit des traîtres. Que vous faut-il de plus pour me revenir ? Vous avez vu ses cheveux blonds, vous avez vu son visage tiré, et qu'avez-vous ressenti ? La misère. Elle n'est rien qu'un corps de tristesse qui se balade en souriant, prouvant l'impossible, prouvant l'inexistant. Mais le reflet que vous voyez, ce que vous apercevez, finira pas se briser, tel un réel miroir, en milles morceaux. Alors, pantins, qui voulez-vous suivre ? Là, maintenant, traîtres, il vous faut décider... On ne peut certes pas choisir entre deux êtres, mais on peut choisir entre deux monde, vie, ou mort. S'il vous faut une vie de malêtre, et de noirceur pour remarquer que j'étais vivante et brûlante, alors soit, j'accepterai de vous voir rejoindre la glace et l'obscurité.