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7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 21:09

 

 

          Assise parmi les autres, je ne ressentais rien d'autre que de la peine, mêlée à une rage incurable. Les autres, eux, souriants et hypocrites, seuls maîtres de leurs univers, n'étaient rien, à mes yeux, qu'une source inépuisable de fatigue et de colère. Alors, assise parmi eux, je peinais à trouver un siège à ma convenance, je regardais autour de moi, désolée. Je les voyais tournoyer, rire et festoyer, tandis que leurs yeux menteurs voulaient faire croire à une sagesse acquise depuis bien longtemps, alors qu'ils ne transmettaient qu'ingratitude, lâcheté et pauvreté. Alors, assise parmi eux, je me sentais seule, transparente, inexistante. Quelle était ma tâche, ici ? Pourquoi étais-je là ? Pourquoi m'avait-on mise dans ce système, pourquoi avais-je l'impression d'être prise pour une imbécile ? Ce n'était pas moi, l'imbécile, pourtant ! Seulement maintenant, c'est lorsque l'on est imbécile que l'on peut se sentir heureux.

           Voilà pourquoi je sentais bouillir en moi des milliards de flammes. J'avais dans mon coeur des fourmis dévoreuses, qui me bouffaient de l'intérieur. J'avais des larmes brûlantes qui irradiaient mes yeux, de l'acier liquide dans le cerveau, qui engloutissait ma raison. Alors que ce torrent d'acier liquide se déversait dans tout mon corps, il répandait partout en moi cette irradiation, cette révolte dévorante. Je ne voulais pas être là, je ne voulais pas devenir artificielle et lâche comme ces autres imbéciles qu'il était si facile de manipuler. Je ne voulais pas devenir de ceux qui ont cette insouciance dévastatrice, de ceux qui n'ont l'espoir que de réussir, qui n'ont d'espoir que pour eux-même. Alors cette révolte se répandait en moi. Mon estomac était rempli d'acide, mes veines brûlantes véhiculaient du sang plus rouge que jamais, mes oreilles n'entendaient plus les merveilles de la vie, n'entendaient que le bruit fracassant de la rumeur populaire. Mes yeux calcinés par la dureté du jour, ne voyaient plus que les bouches déformées par des propos malheureux, et des coeurs et des corps en décomposition. En apparence, ils étaient les mêmes. Leur esprit, lui, avait fini de briller depuis longtemps. Je ne voyais que l'état avancé d'une maladie qu'on ne guérissait jamais. Partout où j'allais, ce qui me semblait être des monstres, sur mon passages, jetaient sur moi des borborygmes dégueulasses. J'étais souillée, trempée, toute tremblante, encore. J'avais l'impression que des centaines de milliards de flèches indigènes étaient lancées sur moi et étaient restées, au dessus de moi, en suspend, menaçantes et malicieuses, comme si elles attendaient un moment de faiblesse de ma part.

           Tout autour de moi s'est mis à tourner, le jour et la nuit se confrontaient en d'interminables éclairs qui passaient devant mes yeux. Mes sens étaient modifiés. Je n'entendais plus rien que le sang rouge qui se déversait encore et encore dans mes veines irradiées. Je ne sentais plus que cette odeur détestable de pourritures, celle aussi de l'hypocrisie fumante dont ils étaient tous coupables. Tout ce que je touchais était fait en acier brûlant, tout me coupait et me blessait. J'avais les mains ensanglantées, déchirées, coupées, mes jambes n'étaient que deux vulgaires branches d'arbres qui supportaient le poids des feuilles et des fruits, qui n'allaient pas tarder à céder, ma tête enfin ressemblait à celle d'un animal. J'étais un monstre parmi eux, féroce et écœurant, qu'on ne touchait jamais, et que jamais on n'approchait, un monstre hurlant dans la nuit, un monstre d'ennui. Ma voix était rocailleuse, grave et sourde. Plus personne ne m'entendait, car je n'étais pas des leurs. J'étais ailleurs, enfermée dans une bulle que je m'étais créée, par soucis de protection. Je n'étais qu'une bête sous leurs yeux ivres d'euphorie, une bête affreuse et teigneuse. Un vilain petit canard du vingt-et-unième siècle, encore plus monstrueux, dégoulinant d'horreur, méprisable en tout point. J'étais prisonnière d'une image, prisonnière de leurs yeux d'éléments corrompus.

           Ce qu'ils ignorent, c'est qu'il vaut sans doute mieux être révoltée, et bouillir, brûler de l'intérieur, qu'avoir un coeur de pierre, et un cerveau liquide, avoir l'apparence d'un monstre, plutôt que des joues roses d'innocent naïf. A trop vouloir jouir de privilèges et d'attentions particulières, on a bientôt oublié les principes et les valeurs. A ne toujours penser qu'à sa gueule, on finit par ne plus en avoir et à s'en prendre des coups.

 

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Oui, j'aime Hémon. J'aime un Hémon dur et jeune; un Hémon exigeant et fidèle, comme moi. Mais si votre vie, votre bonheur doivent passer sur lui avec leur usure, si Hémon ne doit pas pâlir quand je pâlis, s'il ne doit plus me croire morte quand je suis en retard de cinq minutes, s'il ne doit plus se sentir seul au monde et me détester quand je ris sans qu'il sache pourquoi, s'il doit devenir près de moi le monsieur Hémon, s'il doit apprendre à dire « oui », lui aussi, alors je n'aime plus Hémon!


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