Cette nuit là, la foudre était tombée deux fois près de moi. Il y avait eu un premier coup, suivit d'un rugissement sorti de nul part. Puis il y avait eu un autre éclair, qui avait été suivit de près d'un grondement lourd et effrayant. Les gens avaient courru dans tous les sens, ils avaient hurlé, pleuré, et certains avaient même crevé. Pour ma part, lors du premier coup, j'étais au bord du lac, avec la plus belle fille de la terre.
Séréna s'était habillée avec sa petite robe bleue, qui lui descendait jusqu'au chevilles. Elle avait bouclé ses cheveux, et mis des lentilles de contact. On s'était retrouvé près du banc blanc (le seul au bord du lac).
C'était pour moi la plus belle soirée de ma vie, mon premier rendez-vous, mon premier baiser. J'avais tout préparé, tout ce que j'allais dire, tout ce que j'allais faire, et j'étais presque allé jusqu'à minuter chaque étape. Je voulais être sûr que tout se passerait comme je l'avais décidé.
Nous devions d'abord faire une promenade au bord du lac, marcher un peu jusqu'à ce que nos mains se soient rencontrées. Alors, je l'avais emmenée marcher autour de l'eau clair. La nuit tombait, les réverbères commençaient à produire un peu de lumière pour nous éclairer. Séréna riait, souriait, et j'étais aux anges grâce à cela. Elle m'avait regardé du coin de l'oeil avant de serrer ma main pour stopper notre marche. Là, commençait la deuxième partie de la soirée. Je devais lui avouer combien j'étais... Combien elle comptait pour moi. Je n'avais, Dieu merci, pas dit un mot qu'elle m'embrassait déjà.
C'est à ce moment que la foudre m'avait frappé. J'étais totalement électrisé, complètement fou. Séréna me regardait dans les yeux, souriant timidement, rose de plaisir, ce qui me rendait encore plus amoureux d'elle. Je l'avais pris dans mes bras, tandis qu'un grondement déchirait le silence et le calme du lieu, brisant la douceur du moment que nous étions en train de vivre.
Après ce premier rugissement, je m'étais rendu compte que la troisième partie de la soirée n'aurait pas lieu. J'avais proposé à Séréna que je la raccompagne chez elle, parce qu'en vue de l'orage qui devait arriver, je préférais la sécurité à la romance. Pour rentrer chez Séréna, il fallait traverser la place centrale, qui était occupée, ces jours-ci, par une fête foraine bruyante et encombrante.
Nous traversions la place, et la fête, main dans la main, en souriant. Elle me parlait de ce qu'elle avait ressenti quand je lui avais donné rendez-vous la veille, de ce qu'elle ressentait à l'instant. Entendre sa voix me dire qu'elle craquait pour moi était un vrai cadeau.
Séréna fut accostée par un grand brun qui avait du abuser de la boisson. Nous sortions à peine de l'espace de jeux, et ce grand gaillard voulait son numéro. Le ton, entre lui et moi, était monté très vite. Lui usait des mots vulgaires tandis que j'utilisais mon calme et ma patience comme je le pouvais. Ma toute nouvelle petite-amie attendait à côté, et me disait de laisser tomber. Je n'étais pourtant pas ce genre de gars qui laisse les autres draguer ma future fiancée.
Un autre éclair déchira le ciel à ce moment. C'était tout près, et le grondement semblait venir de juste au dessus de nous. Le gars abandonna très vite et courut. En réalité, la plupart des gens de la fête foraine s'en allaient à toute vitesse. Un feu s'était déclaré à l'autre bout de la fête, à cause de la foudre, d'après les gens. Une grosse femme, avec son bébé dans les bras, courait et hurlant que nous allions tous mourir si nous restions là. Les gens commençaient à crier et à paniquer, et quelqu'un avait été blessé. Ils hurlaient qu'il nous fallait absolument rentrer pour nous mettre à l'abris, qu'il fallait qu'on court, nous aussi...
Nous n'avions pas fait comme tous ces gens. Nous avions continué à marcher tranquillement vers la maison de Séréna. Un autre éclair avait frappé la terre, et nous avions entendu la sirène des pompiers. C'était alors peut-être plus grave que ce nous pensions.
C'est un peu avant que nous arrivions dans la rue de Séréna que la foudre était encore tombée. Nous nous étions arrêté, et elle avait lâché ma main. Nous étions face à face, souriant, heureux malgré l'orage qui se tenait juste au dessus de nous.
Et c'est lorsque j'avais commencé à me pencher pour l'embrasser de nouveau que la foudre l'avait frappée, et que je l'avais vue tomber, inanimée dans sa robe bleu, son teint rougi par le choc, ses cheveux mouillés par une flaque d'eau.
Cette nuit-là, au bord du lac, un coup de foudre m'avait rendu heureux.
Cette nuit-là, en revenant du lac, un coup de foudre m'avait pris mon amie.